Natura

natura

La nature est souvent invoquée comme une cause à défendre, et revêt dans certains discours les atours d’une gente dame, voire d’une sainte mère.

Lui porter atteinte relèverait du sacrilège, ce qui confirme la latence du religieux dans nos sociétés.

Pour dissiper ce flou conceptuel, essayons l’étymologie.

Le latin natura prend la forme d’un participe futur, à rattacher au verbe nascor, et signifie littéralement ce qui est destiné à naître ; natura renvoie donc à un potentiel, à la capacité de renouveler le vivant.

Comme le grec phusis, natura connote, par son genre, un principe féminin, du registre de la fertilité.

Fertilité qui n’englobe pas indifféremment toutes les créatures et tous les objets présents en ce monde, mais distingue des chaînes de causes et d’effets, responsables du surgissement et de la perpétuation de formes animales, organiques, chimiques et géologiques, et aussi de leur éventuel anéantissement.

Lucrèce, disciple latinophone du Grec Épicure, insiste sur la nécessité de cet enchaînement rigoureux : il oppose quid queat, et quid nequeat (ce qui se peut, et ce qui ne se peut pas), nous invitant du même coup à faire litière de tous les fantasmes de transformations magiques, démarche que l’Occident a mis du temps à faire sienne, quand on se souvient que Pasteur a dû batailler contre l’idée de génération spontanée (souris naissant de bottes de paille, mouches d’un morceau de viande).

Le mot natura porte donc, dès l’origine, une incitation à combattre les délires superstitieux, à cultiver l’esprit scientifique.